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Ellie, juste Ellie.
12 août 2012

Pourquoi être nounou est parfois une fausse bonne idée ?

 

 

 

Une nounou d'enfer

Après avoir abandonné la fac, j'ai vite trouvé des enfants à garder, parce que par honnêteté envers le CROUS, j'ai prévenu de mon arrêt et n'avait donc plus droit à la bourse (ces charmantes personnes ont donc essayé de me pomper du fric, à la "si t'arrêtes, tu nous rembourses tout", mais j'ai été plus forte qu'eux). En clair, j'avais envie d'ARGENT.


Je pensais que j'allais adorer ça. Que je gagnerai de l'argent à faire un truc génial et reposant. Je pensais qu'on allait s'amuser comme des conquins et qu'il n'y aurait pas de problème. Eh bien, pour une première expérience professionnelle dans ce domaine, j'ai été servie. L'avantage d'avoir souffert, c'est que pour mon prochain boulot de ce type, je saurai exactement quelles erreurs éviter, que ça soit avec les parents ou les enfants, et je ne me laisserai pas marcher dessus comme un pauvre chewing-gum écrasé.


Premier pépin : mon salaire.

La mère m'a mise au parfum dès le début. Ils avaient une belle maison, une femme de ménage, chaque enfant avait sa DS, mais me payer le smic ce n'était pas possible, parce qu'arrivé à la fin du mois, ça leur faisait trop de sous à me donner. Bête, naïve, totalement dans l'angoisse de me faire virer comme une chaussette si j'osais protester, j'ai accepté ce petit salaire. Et puis, il faut bien l'avouer, histoire de paraître encore plus bête... Je comprenais que c'était cher de me payer mes heures, du coup j'étais clémente. Comme si je leur avais rendu service, alors que je me rends compte aujourd'hui, que flûte quand même, c'était un travail... Lorsque je cramais pendant une heure au soleil pour que leurs enfants puissent chaque jour jouer au parc, quand mes nerfs frétillaient à cause de leurs bagarres incessantes, quand je devais leur expliquer en long, en large et en travers pourquoi il fallait obéir aux règles que nous laissaient leurs parents et que ces gamins peu dégourdis trouvaient quand même le moyen de dire que j'étais méchante et égoïste... Eh bien, je me disais que c'était vraiment pas cher payé pour ce que j'endurais moralement. On me dira sans doute que rester debout derrière une caisse ou servir des cocas toutes la journée à des clients malpolis, c'est beaucoup plus fatiguant que ce demi-métier aka nounou, mais moi je vous dis merde. Au fond, lorsqu'un enfant est sage, ça peut aller. Lorsque ce sont deux frères et soeurs qui ne peuvent s'empêcher de courir comme des dingues dans une pièce qui regorgent de coins pointus et d'opportunités de les blesser, qu'ils se moquent de toi lorsque tu leur dis d'arrêter, que tu es sans arrêt yeux grands ouverts derrière leur popotin pour être sûre qu'il ne leur arrive aucun malheur, ça devient vite épuisant. Tu as entre tes mains la responsabilité d'enfants qui ne sont pas les tiens, et c'est pas parce que t'es payée une misère que tu stresses moins. J'avais deux petites vies humaines à préserver, parce qu'ils ne l'auraient pas fait tout seul, ces enfants qui ne comprenaient pourquoi je n'arrêtais pas de leur répéter qu'il fallait regarder avant de traverser, et ne pas bouffer du nutella tous les jours pour ne pas finir gros, moche et triste (comme moi, quoi).


Deuxième pépin : l'autorité.

J'ai une petite cousine de sept ans qui m'obéira toujours comme un petit soldat. Et si elle n'obéit pas, vous pouvez me croire que je n'ai aucun scrupule à devenir sévère. Lorsque je me suis retrouvée devant deux enfants que je ne connaissais pas, et qui se sentaient à coup sûr en supériorité numérique face à moi, j'ai tout à coup eu beaucoup plus de mal. Je me croyais ferme, en fait je n'étais rien. Lorsque le petit me tannait pour aller sur l'ordinateur alors que sa mère m'interdisait de les laisser faire, j'avais beau dire non, parler le plus sévèrement possible, je me sentais ridicule. Il ne m'obéissait pas. Lorsqu'il se battait avec sa soeur, qu'il la giflait, qu'ils se tapeaient, que je leur hurlais d'arrêter, de rester chacun dans une pièce, j'avais l'impression d'être transparente et de parler dans le vide. Lorsque je leur refusais les bonbons car sur le frigo, un gros papier avec "FRUITS ET LAITAGES AU GOUTER SEULEMENT !!!!" était collé, ils insistaient tant, qu'à bout de nerfs, je cédais. J'avais beau essayer d'expliquer calmement, ça ne marchait pas. Crier non plus, ça ne marchait pas. Etre leur amie non plus, ça ne marchait pas. Je pense qu'ils ne m'aimaient pas vraiment, en fait. Ils n'étaient pas teignes, car on a passé beaucoup de bons moments ensemble, à discuter, jouer et rigoler. Mais ces moments difficiles moralement me font douter...


Troisième pépin : l'ingratitude.


Vous y serez toujours confronté avec les enfants. Un enfant, c'est ingrat. Un enfant, ça ne se rend pas compte de ce que tu fais pour lui, et ça ose te lancer des reproches injustifiés et complètement débiles en pleine face. Certains adultes arrivent à se dire qu'ils sont petits, qu'ils ne comprennent pas, et passent au dessus... J'ai vite découvert que j'étais très sensible. Avec ma petite cousine, j'ai appris le sens du mot ingratitude, je me suis souvent décarcassée pour lui faire plaisir, pour au final, si je refusais de lui donner un bonbon ou si je la grondais, redevenir la méchante Ellie.

Avec les deux que j'ai gardé, ça a été pareil. Topo : tous les jours, je les emmenais au parc, et nous restions une heure minimum. Je voulais les laisser s'amuser et s'aérer la tête après l'école. Chaque fois que je leur disais "on y va", ils ne venaient pas, râlaient, faisaient comme si nous n'étions là que depuis cinq minutes... J'ai fini par m'habituer à leur mauvaise foi, typique de l'enfant gâté. Mais un jour, leur mère m'a appelée pour me dire que la petite s'était sentie mal à l'école, et qu'elles préféraient que je les ramène directement à la maison en sortant de e. Lorsque je leur ai annoncé cette nouvelle qui a bouleversé leur vie, j'ai eu droit, il FAUT le dire, à une réaction qui contenait une dose inhumaine d'idiotie. Ils m'ont dit que je ne les emmenais jamais au parc, qu'on faisait toujours ce que je voulais moi, que je n'étais pas gentille, que là il n'y avait aucune raison de ne pas y aller et que franchement je ne pensais qu'à moi. Tout ça avec des regards méchants et haineux. Je me suis stoppée sur place. J'ai ouvert si grand la bouche qu'une abeille aurait eu le temps d'aller faire sa vie à l'intérieur. J'ai lâché un : "Dites-moi que c'est une blague ?", et je me suis énervée comme je ne m'étais jamais énervée sur eux. Je leur ai dit que j'étais bien sympa de les amener au parc tous les jours, que s'ils n'avaient pas conscience qu'ils y étaient tous les soirs, nous n'irons plus jamais et qu'ils verraient largement la différence, qu'ils étaient ingrats, aveugles et que je n'allais certainement pas me fatiguer à leur faire plaisir une fois de plus s'ils osaient me sortir de telles absurdités. Cela n'a eu aucun résultat, si ce n'est un élan de haine envers moi et une immense période de froid. Ils étaient souvent pénibles et désobéissants, mais je n'osais jamais aller les "balancer" aux parents. Ce jour-là, je crois que j'ai craqué. Cela me faisait de la peine, de faire quelque chose qui n'était reconnu par personne, et même pas par les enfants que je gardais. J'avais l'impression qu'on se moquait de moi. Personne ne prenait les efforts que me demandaient ce petit job en considération. J'aurais tout aussi bien pu ne rien faire. J'ai dit au père qu'il fallait leur parler, que je faisais beaucoup de choses pour eux et qu'ils osaient venir se plaindre, ME critiquer, et s'adresser à moi comme ils n'auraient pas dû le faire avec leur adulte référent. Après ce jour-là, nous avons continué à y aller tous les jours, car je ne suis pas vilaine. Mais ils avaient l'air d'avoir compris que jouer au plus con avec moi, ça ne pouvait pas durer éternellement. Je n'hésiterai plus à les punir, et les balancer. D'ailleurs, j'ai remarqué que j'avais gagné en autorité, lorsque après leur avoir couru après jusqu'à 18h dans le parc pour enfin partir, je les ai puni de s'être foutus de ma gueule et d'avoir désobéi. Ils n'ont pas eu de parc durant une semaine. Je peux les remercier, avec leur ingratitude, de m'avoir ouvert les yeux. Etre gentille tout le temps, ça ne sert à rien. Ils ne te remercieront jamais. Alors autant se faire respecter.


Quatrième pépin : les horaires.

Je n'étais déjà pas payée beaucoup, alors lorsque le père rentrait à 18h au lieu de 19h30, alors que j'étais venue pour le nombre d'heures initialement prévues, je l'avais mauvaise. Une heure et demi de moins de payée, alors que je n'y étais pour rien. A cause de cette manie, mon salaire passait certains mois dans la catégorie "argent de poche". Je veux bien comprendre que lorsqu'on peut donner moins de sous, on le fait, mais c'est une humaine qu'ils avaient devant eux, et me prendre pour une quiche ça n'est pas sympa. Pour passer d'un extrême à l'autre, il arrivait qu'à 19h30, alors que j'attendais le retour des parents pour partir à un rendez-vous quelconque (quelqu'un m'attendait souvent à la sortie pour passer la soirée avec), la mère m'appelle et me dise ne pas savoir quand ils rentreraient. Dans ces moments là, je faisais trois secondes de silence pour ne pas m'énerver, avant de dire qu'il n'y avait aucun problème. De toute manière, s'ils n'étaient pas là, que je le veuille ou non je ne pouvais pas laisser les enfants seuls. Mais je pense que ça n'aurait écorché la gueule de personne de me prévenir une ou deux heures avant, ou même la vieille, histoire de pouvoir annuler mes plans. Je suis un jour restée jusqu'à 23h, alors que j'avais été prévenue à l'heure où je partais normalement. Mes heures supplémentaires auraient au moins pu être payées en mode "de nuit", c'est à dire 50 centimes ou 1 euro de plus. Eh bien non. Salaire fixe, qu'on t'ait prévenu ou non, que tu restes tard ou non, qu'on te pompe 5 heures par semaine qu'on n'aura pas à te payer ou non. Côté financier, ce travail m'a vraiment fait perdre patience. Mais je n'osais rien demander, car j'avais toujours la peur qu'ils aillent chercher une autre pigeonne ailleurs, et que par conséquent je passe de "pas beaucop d'argent" à ZERO ARGENT.
 

Je ne crache pas complètement sur ce travail. La preuve, je vais tout de même passer mon CAP petite enfance. J'aime les enfants, je passe de bons moments avec eux et ça ne changera jamais. Mes premiers pas maladroits dans cette branche m'ont permis de comprendre l'utilité de l'autorité, de commencer à l'expérimenter, et de comprendre les erreurs à ne pas comettre avec l'employeur. Pour ma prochaine garde, je demanderais un peu au dessus du smic (elle veut obligatoirement que je vienne en voiture ? une voiture marche à l'essence, l'essence marche aux thunes, il me semble naturel qu'elle participe). De plus, je demanderais à ce qu'en cas d'horaires plus courts que d'habitude, je puisse rattraper les heures qu'on ne m'a pas laissé faire. Je ferais bien comprendre que j'adore ce que je fais, mais que cela reste un travail, et non un loisir qui me fait gagner de quoi acheter des malabars.
Si certaines personnes sont dans mon cas, sachez être conciliant. Mais pitié, ne le soyez pas autant que je l'ai été...

 

 

 

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Commentaires
C
J'ai adoré ton article en mode "Super Nanny" ;) Et je dois te dire que je t'admire : jamais je n'ai gardé d'enfants (hormis mon neveu mais nous sommes d'accord pour dire que la famille, c'est tout de même différent) et je pense tout simplement que je n'aurais pas pu le faire. J'ai fait bons nombres de petits boulots, parfois bien ingrats (femme de ménage au sommet !) mais garder des enfants, non. Je suis pourtant quelqu'un de responsable mais comme tu le dis si bien, ces enfants ne sont pas les nôtres et je crois que j'aurais succombé à un ulcère à l'estomac à force de m'angoisser pour eux et de trembler à l'idée qu'il leur arrive quelque chose pendant mon temps de garde. Et puis je ne suis pas à proprement parler hyper patiente avec les mini-pousses alors si on m'en avait collé deux comme ceux de ton article, je pense qu'ils m'auraient probablement bouffé dans les 24h (autorité quand tu nous tiens !!!). Mais puisque cette expérience t'as permise de trouver ta voie, c'est l'essentiel et c'est super positif :)
Ellie, juste Ellie.
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